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Rencontre avec Babaji Nagaraj & Kriya Yoga

Souplesse égale jeunesse

En avril 2006, alors consultante en Afrique du Nord, je terminais la gestion d’un projet de deux ans lié à la création des processus en ressources humaines et à leur implantation sur un système d’information, SIRH. Pour ce faire, durant la dernière année, j’avais eu sous ma responsabilité une équipe de quatorze informaticiens provenant de l’entreprise Sathya Technologies, d'Hyderabad, en Inde. Signe du destin, je décidai donc de partir pour l’Inde où, disait-on, les miracles étaient encore au goût du jour. 

Quelques semaines et sept vols intérieurs plus tard, après avoir été d’ashram en ashram, du Sud au Nord et d’Ouest en Est, je me retrouvai à nouveau à Delhi. Recroquevillée sur la minuscule couchette de la toute aussi minuscule chambrette de méditation, sur le toit de la Master Guest House de ma logeuse Ushi, je contemplais silencieusement la photo d’un jeune indien, Mahasiddha Kriya Babaji Nagaraj, dont je ne savais alors strictement rien. Ushi n’avait plus de chambre à m’offrir, mais comme je revenais chez elle pour la troisième fois et qu’elle m’avait prise en affection, elle m’offrit de dormir dans cette pièce des plus exiguës, sans climatisation, à 45°C, bondée d’objets de piété, de statuettes et de photos de déités hindoues, comme celle de son gourou, Babaji. Comme les deux fois précédentes où j’avais logé chez elle, à nouveau, Ushi tentait, en vain, de me convaincre qu’il était Celui que je cherchais. Encore une fois, elle me priait de partir à sa rencontre m’affirmant avec enthousiasme que j’y trouverais ce dont j’avais besoin. Mais j’étais si lasse! Après des semaines à sillonner l’Inde, je revenais tout juste de la demeure du Dalaï Lama, dans les Himalayas, à McLeod Ganj, Dharamsala, où je l’avais trouvé malade et incapable de me recevoir en individuel, comme prévu. Ce dernier avait même annulé les entretiens et conférences qu’il devait donner dans le Sud de la France la semaine suivante.

Après une semaine à tenter sans succès de m’insérer dans les centres de méditation qui affichaient tous « complet » et à fréquenter les Tibétains qui n’avaient de cesse de branler leurs bras et jambes amputés sous mon nez espérant ainsi recevoir quelques pièces, je m’étais résolue à revenir sur Delhi. Je n’avais pas dormi depuis plus de 48 heures durant lesquelles j’avais subi les 14 heures du chemin du retour des Himalayas vers la ville, qui consistait en un violent brassage obligé sur la miteuse banquette arrière d’un taxi fou évitant de justesse les précipices à chacun des tournants. Et des tournants, il n’y avait que ça! Et puis, il faisait 45°C et 100% d’humidité et... j’avais mes règles! Bref, je ne me sentais pas la force de repartir à nouveau pour encore seize heures de route sur les cahoteux chemins himalayens de la région d’Almora.  

À nouveau, je refusai donc poliment les conseils d’Ushi. Je n’irai pas à la rencontre de son Babaji. En début de soirée, vers le coup de 20h, je la vis surgir sur le toit où j'attendais encore vainement un peu de fraîcheur pour enfin pouvoir dormir. Je savourais quelques plats faits maison lorsqu’elle m’aperçut et courut vers moi, tout sourire, les yeux en feu. Ushi m’apprit alors que six Allemandes, qui venaient tout juste d’arriver, repartaient à 4h30 du matin pour Ranikhet, Almora, et l’ashram de Babaji Haraikan, qu’il restait une place libre dans leur minibus, et que tout était déjà organisé pour que je les accompagne. Elle me balança tout ça d’un seul souffle avec une exaltation similaire à l’annonce d’un billet gagnant d’une superloterie. Je me souviens très bien de mon sentiment, à ce moment précis. Je n’avais AUCUNE envie d’y aller. J’étais épuisée et dégoûtée à la seule vision mentale de me retrouver encore pour seize heures dans un minivan bringuebalant. Mais, Ushi était si enthousiaste… Et elle avait déjà tout planifié pour moi… Alors, avec un petit hochement de tête couplé d’un faible sourire, j’acceptai mon inéluctable destin. Et puis, qui sait, me disais-je, puisque l’Univers me poussait avec tant d’insistance vers le Mahavatar Babaji, peut-être devais-je enfin entendre cette Voix/Voie qui m’appelait. 

Une de mes photos à l’arrivée : Kumaon, Almora

Il fallut 18 heures et une crevaison pour que nous arrivions dans une région nommée Kumaon, où, semble-t-il, vivaient les Dieux, du temps où ils étaient incarnés dans des corps physiques, puis notre destination finale, Chilianaula, près de la ville de Ranikhet. En route, j’avais appris que tout à côté de l’ashram, se trouvait un hôpital ayurvédique qui offrait toute une série de soins et massages quotidiens liés à notre constitution préalablement déterminée par des spécialistes chevronnés. Finalement, j’allais au moins me faire dorloter un peu!

Une de mes photos à l’arrivée : Kumaon, Almora

Le temple de Babaji, Chilianaula

Ce que je vécus à cet endroit reste inoubliable. Peu après notre arrivée, je suivis le groupe des huit Allemandes vers le temple. Ce rituel allait d’ailleurs se répéter chaque jour, à 7h et 19h. Tour à tour, elles marchaient jusqu’au fond de la salle, d’abord à gauche de l’hôtel afin de saluer la grande photo de Babaji Hairakan, le fameux gourou de Ushi, puis, directement au fond du temple, vers l’autel, pour se prosterner, ventre à terre, devant Mouniraji, le Maître des lieux. Je remarquai que la très grande majorité des dévots négligeaient d’aller saluer la grande photo de droite qui, elle, représentait un jeune et bel indien dont je ne savais rien, mais dont je me rappelais le visage pour l’avoir vu, droit devant moi, alors que je gisais recroquevillée sur la banquette de la minuscule pièce de méditation d’Ushi qui m’avait servi de chambre, la nuit précédente.

Le temple de Babaji, Chilianaula

Ce jeune homme au doux regard m’inspirait davantage que l’autre photo et je n’avais, par ailleurs, aucune envie de me prosterner face contre terre devant l’inconnu « humain » qui siégeait au fond du temple. C’est donc vers celui que j’appris plus tard se nommer Babaji Nagaraj que je vins m’agenouiller. Comme il n’y avait personne autour de moi, je lui murmurai à voix basse : « Écoute, je ne sais pas qui tu es, mais je t’aime bien… Alors, si tu as quelque chose à me dire ou à m’apprendre, voilà, je suis là pour la semaine et, si tu peux lire mon âme et mon aspiration à me lier aux énergies divines, alors fais ce que tu peux pour qu’il en soit ainsi ».

Les jours suivants se passèrent comme suit : lever à 5h30, réception du Chandan (ou Darshan : bénédiction) par le maître Mourajji puis, cérémonie du feu, Puja (qui n’était pour moi alors qu’une suffocation matinale quotidienne par trop de fumée dans une toute petite pièce fermée). Ensuite, à 7h00, on se rend au temple et là, tous (sauf moi, puisque je n’en ressentais ni la justesse ni n’en comprenais le sens) se prosternent de tout leur long devant des statues et autres images qui représentent Babaji Hairakan et chantent pendant 1h30 en psalmodiant des textes en sanskrit. On y revient à 19h et rebelote.

Pendant la journée, nous recevons divers soins, concoctés à base de plantes, à l’hôpital Ayurvédique, mais surtout différents massages, tous plus géniaux les uns que les autres. On mange peu, on est full zen, pas de bruit, pas de pollution, pas de mendiant, une première dans ce pays! Dans la journée, on peut aussi aller s’asseoir sur la galerie de la maison de Mouniraji. 
Mouniraji était un vieil Hindou, vraisemblablement très pieux et totalement dévoué à Babaji. Il ressemblait à un grand Tibétain, avec un air aimable et avait surtout l’air de se contrefoutre d’avoir des fidèles près de lui. Dès lors, je l’aime bien! La dernière journée de mon séjour, sa servante, Pratiba, à ses côtés depuis plus de vingt ans, me jure qu’elle ne l’avait jamais vu perdre patience ni exprimer un seul germe de colère. Ses fidèles, eux, affirmeront qu’il n’a pas d’égo, qu’il est omniscient et que des centaines, voire des milliers de personnes, viennent à sa rencontre chaque année. Mais, cela, je ne le savais guère et ne l’appris que la veille de mon départ.

Je vins donc retrouver Sri Mounirajji chaque jour, toujours étonnée de voir ses fidèles assis en bas, sur les marches d’escalier ou par terre. Comme il était lui-même constamment assis sur une chaise devant sa petite table, très souvent à lire son journal, et que la chaise devant lui était perpétuellement vide, je pris l’habitude de m’y assoir, heureuse et surprise de la retrouver chaque fois disponible, comme à m’attendre. Bien entendu, je ne savais rien des Maîtres et encore moins de l’étiquette à suivre à leur endroit. Aussi, j’optai pour un comportement des plus spontanés et même après avoir noté que les nouveaux arrivants se prosternaient devant lui en lui touchant les pieds avant de s’assoir par terre, je n’en fis rien, car je n’avais, je l’ai dit, ni la compréhension ni le ressenti dévotionnel requis pour accomplir ces gestes.

Ainsi, je parlais à Mouniraji avec respect, certes, mais plutôt comme j’aurais pu parler à un vieil ami ou à un vieil homme qui s’ennuie et à qui je venais offrir un peu de compagnie visant à le distraire d’un quotidien on ne pouvait plus routinier. Il y avait aussi tous ses fidèles, muets comme des carpes, qui gisaient à ses pieds, en attendant désespérément une parole ou un regard que le Maître aurait pu leur jeter, ce qu’il ne fit jamais. Je ne savais pas « Qui » était Mouniraji. Je ne connaissais rien de son histoire. Je ne savais pas alors qu’il était visité et adoré annuellement par de milliers de dévots. De plus, nous étions « hors saison » et il ne se trouvait jamais plus d’une douzaine de fidèles à ses pieds. Mon ignorance fit donc que je n’éprouvais aucune intimidation devant lui et c’est ainsi que chaque jour, je tirais l’unique chaise vide et m’assoyais devant ce grand Maître pour lui poser toutes les questions existentielles qui occupaient alors mon esprit. 

Mouniraji me répondait patiemment, affichant toujours le même petit sourire amusé, comme s’il se disait : « D’où peut-elle bien sortir, celle-là ? ». J’en étais parfaitement consciente, mais je me disais que le pauvre avait tellement l’air de s’ennuyer, qu’un peu de divertissement lui ferait le plus grand bien, entouré qu’il était par ce que je considérais alors, sans arrogance, comme un groupe de silencieuses sangsues spirituelles. Alors, chaque jour, je reprenais ce rituel, faisant régulièrement des pauses après avoir avisé l’entourage en rigolant que si personne ne posait de questions, je continuerais, et ce serait tant pis pour eux. Chaque jour, un nouvel éclat de rire jaillissait, et chaque jour, personne n’osait parler, alors je poursuivais mes échanges et recevais, jusqu’à en faire des colliers, les perles de sagesse de cette douce vieille âme oh combien sage !

C’est en fin de journée du quatrième jour, que la servante de Mouniraji, Pratiba vint me voir au centre pour m’informer qu’elle devait faire mon reçu de paiement et que la coutume voulait qu’il soit fait au nom spirituel du participant. Comme je n’en avais pas, elle me demanda de m’en inventer un sur le champ attestant que c’était sans importance. Je lui demandai alors de quelle façon étaient normalement choisis les noms spirituels et elle m’expliqua qu’ils étaient donnés très parcimonieusement par Sri Mounirajji, selon son inspiration face au dévot, mais que je ne pouvais certainement pas espérer en obtenir un puisqu’il n’en distribuait jamais lors du premier passage d’un disciple. Me vint aussitôt l’idée que j’étais venue du bout du monde pour atterrir dans ce coin perdu de l’Himalaya, à fortiori ayant quasi été contrainte par un inéluctable destin, et que, de plus, je n’y reviendrais sans doute jamais. Par conséquent, je ne perdrais certainement pas la chance de demander un nom spirituel à Mouniraji! Je tournai précipitamment les talons et me dirigeai vers la maison du Maître en faisant fi des cris de Pratiba qui tentait vainement d’arrêter mon élan. À nouveau, je trouvai « ma » chaise vide, juste devant Mouniraji qui lisait son journal entouré d’une dizaine de disciples silencieux étendus sur le balcon autour de lui. Je m’assis devant lui et lui expliquai en détail ce qui venait de se passer, ainsi que ma demande. Il tourna la tête et plongea son regard vers l’infini, au-delà du Mont Kailash qui, dans une magnificence sans pareil, apparaissait droit devant nous. Je suivis ses yeux et je vis loin dans le ciel les rayons du soleil trouer les nuages pour venir faire briller la neige sur les cimes himalayennes donnant une impression fugace de lumière céleste. Il régnait un silence total.

Tous, nous retenions notre souffle. Je retenais aussi le mien. Après cinq bonnes minutes d’attente confiante, la pensée me vint que j'étais sans doute allée trop loin… que Mouniraji ne faisait peut-être que m’ignorer, que je devais faire preuve d’humilité et accepter qu’il ne m’offre pas ce qui semblait être un privilège réservé aux initiés dont je ne faisais vraisemblablement pas partie. N’ayant d’autres choix et ne voulant rien forcer, j’acceptai donc ma défaite en lâchant totalement prise sur ma question précédente et, sans aucune attente, pour la première fois, je restais silencieuse et calme à contempler le paysage. 

Cinq autres minutes d’éternité s’écoulèrent où mon âme put goûter la nourriture exaltante de l’immensité qui régnait là. Soudain, je l’avoue sincèrement, à ma très grande surprise, Sri Mouniraji se tourna vers moi et avec un magnifique sourire me nomma « Jaya ». Tous ceux qui étaient présents firent un « Oooooohhhhhh » d’étonnement et de ravissement qui jaillit comme une musique à mes oreilles. Ils avaient l’air si enchantés par ce nom que je ne pouvais que m’en réjouir aussi. Je remerciai aussitôt chaleureusement le Maître et ne tardai pas à lui demander la signification de ce joli nom que tous semblaient déjà connaître, sauf moi: « Victory» (victoire) me répondit-il, toujours souriant. J’eus alors l’idée qu’il avait sans doute contacté une inspiration l’informant que je vaincrais tous les démons de ma personnalité et autres obstacles sur mon chemin et qu’un très beau jour je goûterais enfin à la liberté d’Être, à l’unification entière, fusion de la personnalité et de la conscience, à la Réalisation. Du moins, ce fut l’espoir que je rapportai, en cette fin du mois de mai 2006, avec cette photo prise à cet instant précis tout juste en sortant de la maison de Mouniraji. Je peux ainsi me rappeler ce magnifique soleil qui perçait alors les nuages de sa victorieuse Lumière et cette phrase que j’ai fait mienne depuis :

« S’il y a des nuages dans votre vie, regardez un peu plus haut, le soleil brille encore! »

Mai 2006, après avoir été nommée « Jaya » par Mouniraji, photo prise en sortant de chez lui avec cette inspiration.

La veille de mon départ de Chilianaula, je me rendis à l’échoppe de l’ashram et je fis l’achat d’une photo qui présentait Babaji Hairakan et Mouniraji. J’avais eu l’idée de rapporter ce cadeau à ma logeuse à Delhi, Ushi, ainsi qu’à son époux, fidèles et dévoués disciples de longue date de Mouniraji. Ils avaient été pour moi les initiateurs de ce voyage si extra-hors-de-l’ordinaire et je voulais les remercier de la meilleure façon qui soit pour eux. Je me rendis donc aussitôt auprès de Mouniraji et, après avoir enjambé l’habituel petit groupe assis sur les marches, je m’assis face à lui « sur ma chaise » habituelle, en lui présentant aussitôt la photo et lui demandai le plus simplement du monde de bien vouloir la dédicacer à Ushi et son époux. Mouniraji me regarda droit dans les yeux, sourit discrètement, et s’exécuta sans attendre, puis me remit la photo. Je le quittai l’instant d’après, comblée et satisfaite, sachant déjà que Ushi en pleurerait de joie, ce qui ne manqua pas d’arriver.

Le soir venu, l’allemande qui avait accepté de m’amener à l’ashram de Babaji, à la demande de Ushi, celle qui avait accepté avec enthousiasme que je me joigne à son groupe, que je partage la banquette avant avec elle et le chauffeur pendant seize heures et même que je partage sa chambre pendant une semaine, explosa littéralement devant moi. Avec un sourire qui semblait lui demander un prodigieux effort, elle s’écria qu’elle n’en pouvait plus, que trop c’en était trop, qu’elle devait m’avouer la jalousie extrême qui la tenaillait devant les trésors que je recevais depuis mon arrivée à l’ashram de Mouniraji et dont, de toute évidence, je n’avais aucunement conscience.

Avec l’organisatrice du groupe d’Allemandes qui me conduisit vers Babaji. 

Elle prit alors la responsabilité de m’expliquer « QUI » était Mouniraji, à quel point celui-ci était vénéré, qu’à chaque printemps des milliers de personnes venaient du monde entier pour le retrouver dans un endroit non loin de là pendant une semaine complète et que, ma façon de le regarder dans les yeux, de lui poser des questions, de lui parler nonchalamment du beau temps et de la belle vue qu’il avait devant sa demeure, était pour elle aussi choquante qu’inacceptable. Elle m’expliqua ce qu’étaient les gestes de prosternation, du toucher de ses pieds, qu’il ne fallait pas regarder un maître de son rang dans les yeux et encore moins s’asseoir à sa hauteur et que c’était donc pourquoi tous ses dévots s’asseyaient à ses pieds et que, surtout, je n’avais aucun droit de m’assoir sur la chaise face à lui. Elle m’avoua également qu’elle avait été abasourdie lorsqu’elle avait entendu Mouniraji me donner mon nom spirituel puisque plusieurs de ses amis étaient venus, avec elle, d’Allemagne chaque année depuis six ans, toujours avec cet espoir, et qu’ils s’étaient entendu répondre encore et encore « not now » (pas maintenant) de la bouche du Maître. Elle me précisa aussi que le fait d’avoir vu Mouniraji signer la photo pour ma logeuse Ushi l’avait totalement achevée puisque j’avais ainsi reçu des mains du maître pas moins que l’équivalent d’un lingot d’or. Elle me confessa enfin qu’elle avait elle-même une question pour Mouniraji qui lui brulait les lèvres depuis quatre jours, mais qu’elle n’arrivait pas à la lui poser, toute impressionnée qu’elle était par le personnage, et que mon détachement à m’entretenir avec lui la rendait folle de jalousie. Ouf ! J’étais consternée… 

Ce fut à mon tour de forcer un sourire et de lui offrir ma désolation devant son malaise. Je tentai timidement de l’encourager à poser sa question et finis par lui dire que je ne me sentais tout simplement pas mystifiée devant cet homme, bon, généreux, fort sympathique, certes, mais de chair et de sang comme nous l’étions aussi, que ça n’avait jamais été ma nature d’être impressionnable et que je n’avais jamais été une groupie de comédiens, de musiciens... ni de gourous. Bien sûr, je me dois tout de même de spécifier qu’au travers de toute cette expérience unique il m’est arrivé de sentir mon âme et mes cellules vibrer intensément, d’être exaltée et émue jusqu’aux larmes alors que, dans le temple, je me sentais envahie par la ferveur des prières, le son du chant des mantras et l’incontestable puissance de l’énergie qui en émanait.

Enfin, il me fallait rentrer. Les Allemandes restaient une semaine de plus alors que je devais revenir à Delhi pour prendre mon avion et retourner travailler en Algérie où j’étais en poste en tant que consultante expatriée depuis deux ans. Je me rendis donc une ultime fois à la maison de Sri Mouniraji, et, malgré toutes les consignes reçues, m’assis sur « ma » chaise, le remerciai chaleureusement, yeux dans les yeux, et vis son doux visage, son sourire amusé et ses yeux pétillants pour la dernière fois. En quittant sa demeure, je ne manquai pas de me retourner et de m’arrêter un instant devant sa maison afin d’imprimer tout au fond de moi cette vue mirifique qui m’avait accompagnée pendant cette expérience inusitée, là, au bout du monde, à Chilianaula, Ranikhet.

Je partais sereine mais, comme par un autre incroyable hasard, alors que je devais revenir seule en taxi vers Delhi, Pratiba, la dévote la plus proche du Maître, depuis 21 ans, me demanda de venir avec moi puisqu’elle devait se rendre, très exceptionnellement, à Delhi afin d’effectuer quelques achats pour l’ashram. Nous nous sommes donc retrouvées, toutes deux, côte à côte, pendant plus d’une douzaine d’heures, et ce petit bout de femme réservée normalement très peu loquace, comme elle me l’avoua elle-même, me parla quasi sans répit de celui qu’elle appelait affectueusement : « Son Maître ». Elle me parla de Babaji, de Dieu, de sa vie de prières et de sacrifices, et me raconta comment elle était devenue le bras droit de Mouniraji, sa servante et totale dévote. Cette femme avait tout laissé derrière elle pour le suivre et, je l’avoue, elle incarnait le don de soi intégral dans son quotidien. Avant de quitter les Himalayas, nous nous arrêtâmes pour prendre un repas. Elle m’apprit alors à bénir ma nourriture, m’expliquant l’importance de cette intention. Elle m’expliqua aussi la force des sons sacrés sanscrits, qui, répétés depuis des millénaires, sont ainsi gorgés d’énergie et de pouvoir. À ma demande, c’est aussi elle qui me donna mon premier mantra, celui de Shiva : « Om Nama Shiva ». Elle priait sans cesse, même en parlant, toujours en travaillant. Je dois admettre qu’après plus de douze heures de conversation avec elle, et malgré la traversée des routes tortueuses habituelles, je ne ressentais aucune fatigue, mais plutôt une incroyable énergie vivifiante dans tout mon corps et mon esprit et, oui, j’en fus vraiment impressionnée.

Il m’est arrivé souvent de penser qu’un jour j’irais rendre visite à Mouniraji, que je pourrais alors lui signifier que toute l’attention qu’il avait offerte à cette petite Québécoise sans gêne n’avait pas été vaine puisque j’avais continué sur le chemin du Kriya yoga de Babaji et que j’avais la grâce de le propager en tant qu’Acharya pour le Québec. Mais Mouniraji quitta son corps en août 2012, avant que je ne puisse le revoir. Pourtant, je souris à l’idée de le retrouver, quelque part, dans cet ailleurs meilleur, baigné d’un amour lumineux et rayonnant, lui signifiant ma gratitude éternelle alors que, amusé, il me répondra à nouveau d’un simple et pétillant regard.

Après avoir remis la photo dédicacée à Ushi, ma logeuse de Delhi, mais surtout mon entremetteuse vers Babaji Nagaraji, comblée, émue aux larmes, elle me remit à son tour un cadeau qui allait être la clé d’un nouveau tournant de ma vie : un livre « Autobiography of a Yogi » de Paramhansa Yogananda. C’était à la toute fin du mois de mai 2006 et c’est ainsi que je quittai l’Inde, satisfaite et sereine, le cœur rempli de gratitude. J’allais y revenir d’année en année pour de nouvelles aventures, mais ça, je l’ignorais encore.

Toujours en poste à Alger, je me rendis à Paris, deux mois plus tard, pour un weekend. J’eus alors l’idée de passer à la librairie dans l’espoir d’y trouver le fameux livre en français, ma langue natale, afin d’en faciliter la lecture. Dès les premières pages, je fus absorbée par l’histoire qui me révéla encore plus profondément la valeur et la puissance du Kriya yoga. Il ne me restait plus que quelques pages à lire lorsque je me dis que, peu importait où je devrais me rendre à travers le monde pour être initiée à ces techniques, j’irais, quoi qu’il m’en coûte et, oui, où que ce soit! Je fouillai donc frénétiquement les quelques dernières pages restantes, dans l’espoir d’y trouver le nom d’un lieu, une adresse ou même un numéro de téléphone.

Babaji

Et puis, ce fut le choc. Je fus abasourdie de voir que, en fait, l’ashram principal du Kriya yoga de Babaji Nagaraji avait été établi à une heure de route de chez moi, au Québec! Ébahie par la surprise, je riais toute seule du clin d’œil espiègle que me faisait la vie, d’avoir cherché si loin ce qui était si près de moi. Dans ce même élan de discernement, je réalisai, en toute conscience, jusqu’à quel point ma demande sincère et insistante, voire viscérale, de trouver une pratique quotidienne ou encore le meilleur des gourous pouvant me conduire à la Réalisation et l’intégration du Soi divin, avait été parfaitement comblée, pour ce dont j’avais besoin, à cet instant précis de ma vie. Demandez, vous recevrez ! (et attention à ce que vous demandez... car vous pourriez l'obtenir!!!)

Kriya Yoga

En septembre 2006, je fus initiée au Kriya yoga de Babaji par Satchidananda M. Govindan à Paris et en novembre de la même année au niveau 2 qui vise l’intégration des techniques dans notre vie quotidienne. À l’été 2008, j’étais prête à intensifier ma pratique et réalisai le 3e et dernier niveau. En janvier 2009, lors d’un pèlerinage au Tamil Nadu, dans le sud de l’Inde, alors que nous étions dans l’immense et magnifique temple d’or de Shiva, à Chidambaram, Satchidananda vint me voir pour me dire qu’il avait été inspiré par Mahavatar Babaji et qu’il avait reçu un nom spirituel pour moi, si je voulais bien le recevoir. C’est donc lors d’une très belle cérémonie que lui-même et un prêtre du temple me baptisèrent de mon nouveau nom spirituel, JnanaShakti, ce que j’appris plus tard signifier : « Le Pouvoir de la Sagesse » ou « Le Pouvoir de la connaissance transcendante », ou encore : « Le pouvoir de la connaissance intuitive toute connaissante ». Je mentionne que le nom spirituel est inspiré par le Maître pour le disciple comme une représentation de son but ultime à atteindre dans cette incarnation, c’est-à-dire, son mandat de vie, son Dharma. Mais bon... il restait du nettoyage à faire !

Au cours des années qui suivirent mon initiation aux techniques du Kriya yoga de Babaji, je refis le 1er niveau à sept reprises, pour le plaisir d’être avec des chercheurs de vérité, le 2e et le 3e niveaux, trois fois chacun, et la formation de professeur avec la sublime Durga, deux fois. Je fis également plusieurs pèlerinages en Inde. Enfin, j’eus l’extrême grâce d’une apparition du Siddha Boganathar (J’eus une double confirmations que c’était bien lui, joyeux, très petit, totalement charmant et généreux de ses connaissances) qui me démontrait en souriant comment faire une guérison énergétique à travers les couches colorées du champ magnétique (aura) d’un individu. Une autre fois, une seule fois, je vis clairement Babaji avec son corps, de tout son long (eh oui ! Cela m’impressionna, habituée que j’étais à voir seulement son visage), qui vint me donner un précieux message.

Au début 2011, j’allais en Inde pour une cure ayurvédique de trente-deux jours couplée de mes pratiques quotidiennes de Kriya yoga. Je me concentrai ensuite à accomplir les exigences liées aux pratiques intenses d’une année entière, prérequis pour mon ordination comme Acharya qui eut lieu en novembre 2012. Cela me conféra, par l’entremise de Satchidananda et de son rigoureux enseignement, la grâce, la responsabilité et le devoir d’offrir à mon tour le Séminaire d’Initiation au Kriya yoga de Babaji à tous ceux qui m’en font la demande. Et si je savais que ce n’était ni l’enseignement ni les connaissances qui me rapprochaient, ne serait-ce que d’un iota, de la Réalisation de qui je suis, de tout ce que je ne suis pas, de la Réalisation de l’illusion des drames de la vie ou de la Réalisation de la plénitude de l’Union Cosmique. Je savais aussi qu’enseigner est le meilleur moyen d’apprendre. Enseigner des techniques d’élargissement de conscience ne pouvait que m’obliger à poursuivre l’élévation vibratoire requise pour me garder sur un chemin au-delà du mental et me rapprocher de la supraconscience.

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